vendredi 24 mai 2013

"Tu veux faire quoi quand tu seras grand(e)?"



Est-ce moi où le temps c’est soudainement accéléré depuis mars ? Pas eu l’impression de pouvoir souffler.
Où sont passées les couleurs tendres du printemps ? Les feuilles à peine vertes, les fleurs, les oiseaux qui sifflotent gaiement (à six heure, ce qui donne envie de sortir le fusil). Tout a disparut, entouré d’une épaisse grisaille. L’été ? C’est quoi ça ? Un nouveau Pokémon légendaire ? 
N’empêche qu’en quelques jours les arbres ont perdu cet aspect prépubaires de grandes tiges pleines de boutons et ont pris un feuillage si dense que les zozios qui y entrent ne semblent n’en jamais ressortir. Ma résidence universitaire est-elle bordée de saules cogneurs ? 
Malgré tout, je vois encore des amoureux se tenir la main dehors dans les rues. Est-ce que le temps change son court par un quelconque protocole physique quand on se sert d’un corps autre que le sien pour s’ancrer dans la réalité ? Ce que je vois, ce sont des couples, sous le soleil ou sous la pluie, qui s’étreignent pour ne pas oublier qu’ils existent et pour oublier qu’ils sont là, et que les saisons passent autour d’eux. Deux jeunes qui se bécotent sentent- il le poids de l’instant comme ces personnes âgées qui viennent de se poser sur un banc dans le parc, qui s’effleurent du bout des doigts ? Vit-on au ralenti ou en accéléré quand on est deux ?


En attendant entre pluie, soleil, pluie, voici les vacances qui arrivent, non, qui sont là, et maintenant je peux souffler et vous raconter mes déboires. 
Après m’être fait volé mon ordinateur, avoir entendu mon disque dur faire un « couac » d’agonie et  avoir vu deux informaticiens et un employé de Darty hausser les bras, j’affirme que le dieu de l’informatique n’était pas avec moi cette année. Comme je n’ai jamais eu de chance en amour, mais un bol de cocu pour tout le reste, je suppose avec espoir que c’est le signe avant coureur d’une grande entreprise sentimentale. Non ?
C’est donc après avoir successivement pleuré toutes les larmes de mon corps et craché les flammes de l’enfer, (et après une cure de barbe a papa, de pomme d’amour et de gaufres à la fête foraine de chez moi), que je me suis rendue à l’évidence : après tout, à part les photos et les musiques, tout est encore dans ma tête, mes articles, mes histoires, mes poèmes… Il me suffit de prendre mon temps et de réécrire tout ça.
Attendez deux minutes. Temps ? Temps ?!!!! Qui a parlé d’heure, de jours, de semaines, de mois ? Et tel un petit lapin blanc avec sa montre à gousset me voici en retard, terriblement en retard. Les plus que flippant dossiers de master me font de l’œil et des propositions scandaleuses : «Allez, come on baby ! Tu le sais que t’auras pas le courage de t’occuper de moi hein poulette ? Tu le sais ce que je te réserve ? 5 pages d’un dossier argumenté et quelques grillages de neurone avec la préparation d’un CD rom. Connaissant tes capacités informatiques, j’en ris d’avance. Allez laisse toi tenter, déchire moi et oublie tout ça. »

C’est vrai : c’est rien ce qui se joue là, quasiment rien. 
Juste mon avenir

Tout le monde veut aller plus vite que le temps. Suffit de se pencher à la fenêtre pour voir quelqu’un courir, un œil sur son Blackberry ou son Iphone (Allô ? Nan mais allô quoi ? T’es au 21e siècle et t’as encore une montre ? (pardon pour les personnes intelligentes qui liront cet article) ) Le temps passe vite, et tout le monde nous le dit, nous le répète.
Tout commence en maternelle : « tu veux faire quoi quand tu seras grande ? » La question que personne n’évite, que tout les enfants adorent, que tout les ados redoutent, que tout les adultes regrettent. Quand je serais grande ? Mais laissez-moi déjà être petite. Ça passe si vite l’innocence, n’est-ce pas Serge ?
Et puis c’est quel âge grande ? Parce que déjà au collège on nous met la pression : le Brevet = l’avenir. Puis le lycée : le Bac = l’avenir.
Pour découvrir au final que l’avenir, c’est du présent déjà passé quand on s’en aperçoit.
Et après le lycée ? Après le bac ? Les grands discours : « Tu bosses pas ? Tu étudies ? Quoi ? Les lettres ? Mais ça sert à rien ! Tu veux être prof ? Non ? Ben oui ça sert à rien, c’est ce que je disais.  Ah ces gens qui foutent rien, qui savent pas quoi faire de leur vie… Mais t’as de la chance de pouvoir penser comme ça. Mais non c’est pas ta faute, t’a été mal conseillé… orientation de merde dans les écoles… Tiens conseillère comme métier, ça ne te dit pas ? Non ? Bon. Nan mais t’as le temps !... Tu aimes quoi ? Les arts ? C’est bien ça. Comédienne ? OK, mais comme métier tu veux faire quoi ? Ah non désolée mais artiste c’est pas un métier c’est un loisir parce que pour bouffer faut autre chose hein !...Non mais t’as le temps… »
Puis un jour soudain, on a plus temps. La date de péremption doit se profiler à l’horizon : « Mais décide toi quand même c’est dingue à ton âge (n’importe lequel marche) de pas savoir ce que tu veux faire ! tu veux faire quoi au final ?». Alors pour faire sourire, pour clouer le bec de l’autre en face, quel que soit son âge et le respect qu’on lui doit ou non, je répond : «Survivre ». Et si quelqu’un voit à travers mon mensonge, continu avec une morgue mal placée : « Sérieusement ! C’est quoi ton but dans la vie ? » 
Moi ? Tomber amoureuse.

Virginia 2.0